Lors du salon de Vierzon, en 2009, Un colectionneur, Max Lucas, expose un Nosferatu qu'il a entièrement rénové.
Pour cette occasion, une affiche rédigée par Nelly Achille est exposée à coté du Nosferatu.
Elle raconte l'historique de la naissance de ce flipper original.
Petite histoire du NOSFERATU selon Nelly
Prologue :
Au début de 1984, lors d’un dîner entre amis, deux passionnés d’électronique et d’informatique se rencontrent. L’un est ingénieur électronicien indépendant, l’autre est électronicien et vend aux particuliers des flippers qu’il restaure tout en assurant la gestion et la maintenance d’un parc de jeux automatiques lui appartenant.
Tous deux sont amateurs et joueurs de flipper, appréciant autant l’aspect artistique et technique que ludique.
Conscients des technicités pouvant être mises en œuvre et du mode d’expression qu’il pourrait être grâce à sa conception artistique et graphique, enthousiastes et fonceurs, ils décident de mettre en commun leur connaissances et d’étudier la conception d’un flipper de A à Z.-Le flipper était alors le jeu le plus populaire dans la plupart des bistrots français, alliant convivialité et esprit de compétition. La viabilité d’un tel projet et son succès ne faisaient aucun doute.
C’est ainsi que démarre l’histoire de Nosfératu et de ses deux créateurs.
L'histoire de Nosfératu:
Le Dracula de Stoker est un gentilhomme suave et élégant, un être au charme d'un autre temps, mystérieux et raffiné. Le Nosfératu de Murnau est pâle, rigide, le crâne chauve et déformé, tel un cadavre aux mains décharnées et au regard obnubilé, cerclé par un contour de suie, marquant une désespérante solitude. Alors que Dracula est tragique, le Nosfératu suscite la répulsion. Son antre est un château en ruine érigé sur une lande désolée où se côtoient le sauvage et la bestialité. Sa demeure est la manifestation visuelle d'une âme ténébreuse. il est accompagné par des cohortes de rats.
Les premières esquisses :
Nous avions chacun un projet de plateau pour notre premier modèle. Curieusement, alors que leur thème était proche, nous ne nous étions pas consultés car nous ne nous connaissions pas encore lors de nos premières esquisses.
L’un des thèmes était le « TGV » (nouvellement mis en service à l’époque), L’autre un rally automobile. L’objectif à réaliser lors de la partie de jeu étant, pour chacun, un parcours.
Le plateau du « TGV » étant déjà monté sur une planche prototype, c’est celui que nous décidons d’utiliser pour notre flipper.
Je ne connais pas l’explication, mais le graphisme sera quelque peu sans rapport avec l’idée d’origine et la partie de flipper qui devait se dérouler tout au long d’un voyage en « TGV » se transformera en un épisode de la vie d’un vampire. Qu’importe, l’essentiel est de mener à bien notre projet.
Les logiciels sont développés par nos soins en assembleur à l’aide de nos ordinateurs « Victor ». Une anecdote : Ces ordinateurs n’ayant comme moyen de sauvegarde qu’une cassette de type audio de l’époque, il nous arrivait fréquemment, lors de nos développements, de devoir réécrire un grande partie de notre travail suite à une interruption de l’alimentation ou à un plantage.
L’électronique mise au point, les calques à l’échelle 2 permettant de réaliser les photographies nécessaires à la fabrication des circuits imprimés sont réalisés. (Encore une fois tout à la main, ruban adhésif et pastilles transfert).
A ce moment, un industriel de nos connaissances accepte de nous fabriquer les premières cartes électroniques dans la perspective de participer à l’industrialisation du projet lorsqu’il sera à terme. -Nous ferons d’ailleurs avec lui certains de nos déplacements en Italie afin qu’il découvre le potentiel et se fasse une idée globale du travail nécessaire à l’industrialisation-.
Le rêve se concrétise
Nous faisons construire avec nos propres finances 10 exemplaires du flipper Nosfératu . Nous en vendons 7 à des opérateurs de jeux et plaçons les autres dans des bistrots afin de vérifier leur accueil auprès des joueurs et leur fiabilité.
Du coté technique, malgré quelques défauts de jeunesse auxquels nous remédions très vite, le résultat est à la hauteur.
Du coté de l’accueil des joueurs, c’est un franc succès, notamment sur la convivialité. Les relations entre les attraits de jeu et l’objectif de la partie sont claires et compris très rapidement par les joueurs (point primordial pour la viabilité du jeu auprès du public).
Un autre point marquant sur l’aspect convivial et distractif de Nosfératu est que, à une séquence de la partie, lorsque le joueur a collecté un certain nombre d’éléments, le vampire Nosfératu chante. Lorsque plusieurs joueurs étaient en compétition ensemble, il n’était pas rare, à ce moment, d’entendre les joueurs reprendre en chœur la courte chanson de Nosfératu autour du flipper.
La réalité est là
En décembre 1985, lors de l’exposition annuelle des jeux automatiques, une société commercialisant des flippers nous offre une place sur son stand pour exposer notre Nosfératu.
Beaucoup de professionnels sont curieux et intéressés par notre réalisation et même désireux de faire l’acquisition d’un exemplaire.
Malheureusement, les pratiques de la profession n’étant pas de verser des arrhes et de signer un bon de commande mais plutôt d’acheter ce qui est disponible, nous ne pouvons obtenir de commande ferme. (Ce qui ne nous aidera pas dans notre recherche de financement).
Après plusieurs dossiers de demande de financement refusés, fatigués d’avoir négligé nos propres entreprises pour ce projet et ne trouvant personne pour financer une telle opération dans un domaine méconnu du grand public. -Domaine victime entre autre de sa confidentialité-, nous devrons nous résigner.
Nosferatu ne restera qu’une tentative parmi d’autre de faire naître en France une industrie matérielle du jeu, Industrie non pas financière mais génératrice d’emplois nombreux, depuis la conception, la fabrication, la logistique, la commercialisation, la maintenance et le recyclage de fin de vie.
"Ce fut une belle aventure et j’en garde pour ma part le souvenir de la naissance d’une réelle amitié… cette expérience m'apprit également que le pas entre rêve et réalité n’est pas franchissable uniquement par la volonté ou par l’opiniâtreté de chacun…"
écrit par Nelly Achille @2009
Merci à tous ! Et Bonne visite.